Antonio Salieri - Tarare (Musique classique)

3 Août 2019

Une belle découverte !

Le casting de cet opéra est prometteur : Salieri à la musique et Beaumarchais au livret ! Il s'agit du seul opéra écrit par Beaumarchais et du troisième et dernier opéra français composé par Salieri. En bon homme de théatre, Beaumarchais veut que la musique soit au service du texte. Et c'est une oeuvre agréable qui s'offre à nous tant par son histoire que par son traitement musical ! Le fait que la musique suive l'action et soit en permanence orchestrale amplifie le dynamisme de l'histoire et assure une continuité narrative et musicale qui capte l'attention de l'auditeur durant les 2h45 de l'opéra. L'association des deux artistes, l'un maître de la musique, l'autre maître du théâtre, a engendré une oeuvre délicieuse !

Dans un long prologue, la Nature crée les humains. D'entre eux, le Génie du Feu nomme les principaux personnages et leur donne un rang. Atar, despote perfide, sera Roi d'Ormus, un royaume d'Orient. Tarare sera le personnage vertueux et valeureux de l'histoire, soldat nommé général des armées par Atar et mari amoureux d'Astasie. Le roi cruel, amoureux jaloux de la même femme, fait enlever celle-ci pour le malheur de Tarare. S'en suit une intrigue aux multiples rebondissements menant à la chute et à la mort du tyran, aux retrouvailles des amoureux et à la nomination de Tarare à la tête du royaume par le peuple et pour le bien du peuple. La Nature et le Génie du Feu reviennent pour une courte scène finale philosophant sur la condition humaine en terminant à l'unisson par ces vers : "Mortel, qui que tu sois, prince, prêtre ou soldat ; / Homme ! ta grandeur sur la terre, / N'appartient point à ton état ; / Elle est toute à ton caractère."

Représentée pour la première fois le 8 juin 1787 sur la scène de l'Opéra de Paris, l'oeuvre obtient un vif succès. Le talent publicitaire de Beaumarchais en faisant la promotion avant sa représentation, son rythme mélangeant tragédie, comédie, exotisme et romanesque et des idées politiques sous-jacentes en accord avec l'esprit pré-révolutionnaire des Lumières contribuèrent très certainement à son succès. Celui-ci perdurera pendant et après la Révolution, passant l'Empire et la Restauration avec 131 représentations à Paris jusqu'en 1826. Une scène finale à fort contenu politique intitulée "Le couronnement de Tarare" fut ajoutée pour commémorer l'an premier de la liberté, le 14 juillet 1790. Quant à Salieri, sa carrière de compositeur d'opéras français s'arrêta avec la Révolution puisqu'il était sujet de la monarchie d'Habsbourg et que la Reine Marie-Antoinette était sa principale mécène parisienne...

Cet enregistrement est une première mondiale. On passe un bon moment à l'écoute de cette oeuvre associant talentueusement théâtre et musique avec une interprétation de qualité ! À découvrir !

Avec : Cyrille Dubois (Tarare), Karine Deshayes (Astasie), Jean-Sébatien Bou (Atar), Judith van Wanroij (La Nature), Enguerrand de Hys (Calpigi), Tassis Christoyannis (Arthénée, Le Génie du Feu), Jérôme Boutillier (Urson, un esclave, un prêtre), Philippe-Nicolas Martin (Altamort, un paysan, un eunuque), Marine Lafdal-Franc (Elamir), Danaé Monnié (Une bergère, Ombre de Spinette)