Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Passions illusoires...

David Kadouch a bâti un beau programme inspiré par le roman Madame Bovary (1857) de Gustave Flaubert. Pour cela, il suit la chronologie de l'œuvre illustrant musicalement quatre périodes de l'histoire avec des pièces essentiellement de compositrices de l'époque et quelques-unes d'homologues masculins célèbres. Chacune des périodes s'ouvre avec une pièce de Fanny Mendelssohn issue du cycle Das Jahr ("L'année").

La première période débute en mai avec le mariage d'Emma avec Charles Bovary. Après le court, festif et printanier mois de mai mis en musique par Fanny Mendelssohn, c'est l'amour idéalisé que symbolise la Sérénade de Pauline Viardot, un amour dont rêve Emma Bovary insatisfaite de sa vie routinière et sans saveur de femme de médecin de campagne. Vient alors la mélancolie des trois Nocturnes de Chopin dédiés à la virtuose de l'époque Marie Pleyel dotée d'un destin de muse auquel aurait peut-être aimé aspirer Emma.

Puis s'annonce le mois de septembre de Fanny Mendelssohn, tournoyant, tourbillonnant, presque tourmenté, tout comme ce grand bal auquel sont conviés les Bovary. C'est au son de la transcription d’Ernst von Dohnanyi de la Valse de Coppélia de Delibes, charmante et légère, que se déroule un bal émerveillant Emma. Mais la mélancolie se fait de nouveau sentir avec cet Air russe varié de Louise Farrenc, importante personnalité musicale française de l'époque. La mélancolie des débuts se transforme au gré des variations en air au caractère affirmé et triomphant apportant une touche de vivacité et d'optimisme à la période.

En juin, une profonde mélancolie sentimentale s'empare de l'héroïne marquée par l'amour secret qu'elle entretient avec Léon. Un amour tourmenté qu'elle retrouve et auquel elle s'identifie dans l'opéra Lucia di Lammermoor de Donizetti auquel elle assiste en compagnie de son mari et de son amant présent dans la salle. Ce sont ici les Réminiscences de Lucia di Lammermoor de Liszt au lyrisme emphatique et tragique qui illustrent cette passion trouble. Le personnage de Léon disant préférer la musique allemande, "celle qui porte à rêver", est symbolisée par les Variations sur un thème de Robert Schumann de Clara Schumann alternant entre fougue et délicatesse pour finir.

Endettée, délaissée, c'est en mars qu'Emma Bovary met fin à ses jours. Les trois dernières pièces du programme sont de Fanny Mendelssohn. Elles illustrent autant l'agitation et l’inexorable fuite en avant que le recueillement et la délivrance. Les dernières pièces sont telles des souvenirs à la mémoire de la personnalité d'une femme insatisfaite, n'aspirant finalement qu'à un bonheur inaccessible et fantasmé contre sa condition.

À travers cet astucieux et agréable programme, on est plongé dans une période, une atmosphère et une histoire illustrées par des œuvres autant aptes à captiver qu’à toucher l'auditeur par leur expressivité remarquable des sentiments, leur finesse et leur grâce.

Paru le 8 avril 2022 - Rayon Musique classique

Mode d'emploi de l'écoute : Cliquez sur la photo pour avoir accès à des extraits de l'album (titres en entier après inscription gratuite sur Deezer) :

 

Tag(s) : #Musique classique, #Piano
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :